apnée : on serre les dents,
retient son souffle
toujours et sur tout
ils savent ce qu’il faut faire
à table ils parlent
boustiffe et chicots,
anecdotes de chiens et chats,
de vaines guerres pour des ballons bicolores
(ils savent ce qu’il fallait faire)
de voleurs promus créateurs de valeurs
(ils savent ce qu’il faudrait faire)
des heurts et déboires des hommes qu’ils prennent pour des étoiles
strass et pacotille dans leurs télescopes voyeurs
indécentes étoiles qui ne sont pas les miennes
puis ils se racontent, racontent leurs vies
des océans d’ennui
un océan mat
sans sel et sans vie
un océan d’après monde
à s’alimenter en eaux mortes,
comme un canard, comme une baleine,
il faudra reprendre souffle
s’envoler puissamment
de la surface des choses
à s’alimenter en eau morte,
on envie les pêcheurs de perle
un sentiment de noyade
en vain l’on cherche un éclat,
un reflet de perle, un feu follet,
comme meurt sur les lèvres
le prénom de la muse
une muse d’avant
qu’ils n’aient souillé l’être même
éteint tout ce qui brillait
éteint jusqu’au brasillement de la mer
apnée
apnée dans un monde sans âme
apnée d’une âme sans monde