alors qu’elle avait quatre ou cinq ans, son père prit gravement lucette à part et lui dit : écoute, voilà, ta maman est morte, nous sommes maintenant deux
âgée de sept ans, chaque jour à sept heures, lucette traversait la forêt d’eucalyptus pour aller écouter la messe à notre-dame de santa-cruz, là-haut, au-dessus de mers-el-kébir
plus tard, plus tard, lucette rencontra pierre ; et marchant en montagne, l’un devint non solum, l’autre sed etiam ; ils eurent des enfants qui jouaient dans les vagues à zéralda et dans la neige à chréa,
le bonheur se cachait derrière les rochers, les forêts d’eucalytus,
le temps passa, il y eut les années de guerres ; lucette n’enterra pas son frère faute d’un corps à enterrer, et puis il fallut tout laisser, traverser la mer et presque tout reprendre ;
il y eut ces années de calme et de paix ; dans un chalet où se cachait le bonheur, des barbecues à la montagne et des petits enfants qui s’égayaient parmi les sapins et les torrents ; dans la petite rue où se cachait le bonheur, des déjeuners réglés de salades de tomates joliment disposées dans un saladier de faïence bleue ; dans la grosse ford où se cachait le bonheur, des voyages au soleil des villes d’europe,
une forêt d’eucalyptus,et dans la salle-à-manger, parmi les assiettes suspendues au mur, la grande l’horloge à la peinture craquelée comptait les secondes
un jour, pierre mourut et la vie de lucette s’arrêta ;
le temps changea et devint comme le sable du sablier – une inouïe quantité de grains, tous identiques, incolores et silencieux
sables mouvants
maintenant, le sable a coulé,
et ne sais, lucette, que t’imaginer courant dans la forêt d’eucalyptus,
allant rejoindre les tiens
enfin