nuit bruissante du bruit blanc de la pluie
pluie d’hiver sur l’asphalte,
avant la cendre comme une neige
et le sacrifice des couleurs dans l’acide
au printemps d’après,
sais-tu
comme un mot de toi
déclenche, l’été, une pluie de couleurs ?
et sais tu comme je voudrais me lover dans ton sourire…
(oh ce n’est pas à toi que je parle
c’est à ce qui en toi hésite et doute
à l’hydre des désirs naissants,
de tes ivresses poétiques)
j’ignore si c’est moi qui me trompe
j’ignore si c’est moi qui me trompe
– enfin, je veux dire,
je sais que je ne suis pas d’ici
ici où
la nuit s’écorche sur l’émail blafard des lavabos
sur la peau pâle des prostituées
ici où l’aube saigne,
une blessure purulente
que mes mots sont impuissants à recoudre
ici, leur ici, à l’heure et sans allure
leur ici si nul et non avenu qu’il est un non-lieu
et pourtant nous y sommes jugés
enfants d’adam, ils ont fait leur dieu à leur image
et ont déjà prononcé pour eux-mêmes
leur jugement dernier :
la chute, leur chute,
produire
et c’est à cela qu’ils nous jugent,
les imbéciles
moi, icare, ma chute est autre :
au plus profond,
me hante un pays autre, un pays d’ailleurs,
mon utopie peut-être, un autre non-lieu,
alors je ne sais plus où est le lieu,
où est le non lieu
mais je me demande
quel effet cela ferait
de se sentir, mieux, d’être
un peu chez soi
il n’y a que dans tes bras
il n’y a que dans tes bras
que je me sois jamais senti à ma place
alors à chaque fois ton absence
est un mal du pays
et, te voir t’éloigner sur le trottoir,
l’impression d’être un de ces migrateurs qui plus jamais ne toucheront ni sol ni eaux
car la seule île où ils se posaient pour s’aimer
a disparu dans une explosion volcanique
maintenant je vole
et quand le vol aura mené à l’épuisement
restera comme une chute dans la chute
et je ne saurais plus si c’est moi qui tombe
ou si je ne suis que l’immobile témoin
du sacrifice des couleurs dans l’acide
les couleurs qui disparaissent
d’un monde où tu n’es pas
la chute des couleurs
ma chute,
chut