nuit
j’ai retenu pour ma grotte
un astéroïde du vide cosmique
au calme, entre les galaxies
où ne parvient nul vent solaire
une veille comme une veillée d’armes
en attendant que les phèdres sombres dévorent la nuit,
je ne vois ni n’entend rien si ce n’est…
acouphènes, phosphènes,
les phèdres sombres aux ailes grises ?
non, non, pas encore
les ténèbres et le silence
devant moi, sans limite,
impalpables,
mais toujours lancine le rêve
familier, éveillé,
de ce feu follet funambule,
de cette flamme vagabonde
qui, à l’inspiration,
hante mes mots lorsque je les écrits
mais absent lorsqu’à l’expiration je lève les yeux
mais tip toe
comme une horloge,
comme une goutte,
parfois j’ai le sentiment qu’il vient
tip toe,
dans l’obscurité,
voilé, masqué, drapé dans l’obscurité,
lire par dessus mon épaule
tip toe
je le devine sans le voir, sans l’entendre
qui s’approche sur la pointe de ses pieds de flamme,
tip toe
qui s’approche tout au bord,
jusqu’au seuil, presque, de ma perception,
tip toe
jusqu’au seuil, presque de sa décision,
till stop
hésite, hésite encore, hésite si fort
et finalement recule, s’éloigne,
se replie dans les ténèbres
il me souvient d’un rêve :
j’avais apprivoisé ce feu-follet,
ou plutôt, le feu-follet m’avait laissé l’apprivoiser,
et nous dansions dans le noir
aux heures les plus silencieuses des nuits
oh, comme j’aimais qu’il substitue
sa lueur bleue à celle de ma chandelle ;
et je me souviens
de cette lueur bleue qui teintant mes encres
y faisait germer des magie d’ombres et de mondes inexplorés,
scintiller les reflets d’une tendresse nouvelle
alors je continue d’écrire
la main tendue vers les ténèbres
(sans craindre la morsure des phèdres qui tournoient là-bas dans l’avenir),
espérant que la saisisse un flambeau de méthane
je continue d’écrire,
j’invite l’invisible pour une danse