
les êtres, la distance
je n’en sais ni comprends rien
et moins encore de ce qui les lie, délie
il paraît que ce pourrait être simple
se faire naturellement
mais je ne sais, tu sais,
ce que veulent les êtres,
ce qu’ignorent si souvent leurs humeurs changeantes,
de distance entre eux
de celle qu’il faudrait mettre
de celle qu’il faudrait réduire,
et de nouveau plus un mot ne sort
(ce bruissement ? non, ce ne sont pas des mots)
cela va faire un an
je ne sais plus parler
certains certainement pensent que je garde mes distances
il n’en n’est rien,
mais dans l’expectative,
‘je’ m’essaye, cela s’essaye,
à la fixité, madame,
– sa dérive, quand tout autour
s’éloigne et se meut sans repère
des courses imbriquées des astres
aux désastres de la fourmilière
– aller savoir où l’hystérie, où le mystère, n’importe –
et ‘je’, cela n’est qu’une ombre
en contrecœur, en contrejour,
débordée,
comme éteinte, c’est heureux,
par le chaud cagnard d’argent
‘je’ sens sa caresse,
sur mes épaules dolentes,
‘grand-soleil-d’amour-chargé’ comme une mitrailleuse,
qui gorge la peau tendue des fruits
les cerises, les fraises et les framboises,
comme les tétons d’une amante,
tandis que ‘je’ compte, perds le compte,
des vols de chrysopes et d’éphémères
des grains de sables qui filent,
tintant et colorés,
entre nos doigts et sous nos pieds,
des glyphes de leur labyrinthes mouvants comme les nôtres se délitent,
peut-être c’est le sablier, peut-être c’est le ressac,
peut-être, petit-être
qui ne comprend rien aux êtres,
aux distances,
ni au temps qui passe
un scarabée doré s’est posé sur ma main
puis est reparti, ses élytres comme des gouttes de lumière vibrante
– d’une fréquence folle rapportée
au tic-tac murmuré de mes vertèbres qui criccraquent la fin,
– ainsi soit-il mais avant, j’aimerais que le soleil redevienne coquillage
amanite, nautile,
sentir autour de ces os qui craquent la danse ondoyante de ses tentacules bleu-ciel
on me dit que c’est improbable
mais tu vois,
ce n’est pas le rêve de quelqu’un qui comprend quelque chose