page blanche,
voie blanche,
bruit blanc,
j’entends
j’entends
j’entends
comme les pleurs d’un nourrisson
l’accordéon désaccordé
d’un trisomique
le pas cassé
le pas chassé de sa mélancolie
liquide
une pluie
dans la lumière violette
sur la scène désertée
d’une salle de bal en ruine
une pluie
sur la ballerine d’une boîte à musique
d’une boîte de nuit
la ballerine de phosphore
ce son qui enfle
comme une fêlure du coeur
jusqu’ à remplir l’espace du corps
dit que l’être est un caillot qui se dissout
maintenant et ailleurs
à l’heure de notre mort
un caillot qui se dissout :
du sang se sépare de la nymphe
dans un bécher drapeau polonais,
nous ? nous sommes debout à la frontière
floue et sale
entre la neige et le ciel en feu
un feu de piment dans les palais et les ventres
là, il y a les miradors et les barbelés
maintenant et ailleurs
que notre mort
la nuit, la nuit
n’est pas silencieuse
la pluie, le feu, tout ce qui crépite
la mitraille,
la vocifération d’un plasma
voix blanche
quasi muette pourtant
puisqu’elle ne dit rien
– c’est merveilleux
bruit blanc,
comme un sommeil qui vient