nuances d’une nuit sans lune
sur la terre rase, une unique étoile
comment l’imaginer fortuite ?
du bleu au gris
Si les aubes pluvieuses d’hiver laissaient une tache sur le monde,
il faudrait, des doigts gourds dont la pâleur a rongé l’engelure,
l’étaler – et prolonger la vie d’un souffle bleui
plus chaud pourtant que le cœur d’un nouveau né,
comme pour s’aventurer d’un pas de plus sur la passerelle vide
et surseoir à la forme comme le gris l’estompe ;
et savoir aussi : l’ange est un chien déchu qui s’évanouit
comme un drap dans l’eau bleu-grise
comme un mouchoir dans le vent.
old cold call
les ombres grises et sans visage
dans la ville blanche
et le papier glacé des magazines
s’effacent au soleil des printemps
les ombres glissent sans visage
au loin s’immobilise la grande roue,
latence ultime de flonflons retombés
les ombres gisent sans visage,
et sur leurs joues évanouies
coulent des pleurs scintillants
neige
rythme
les blancs, les silences
ce qui se glisse dans les entre-temps
chaque rythme tisse un pont
chaque a ses gouffres silencieux
des terreurs cloisonnées
des cachots au fond des crevasses
art poétique
« ce que dit la bouche d’ombre » :
son rouge à lèvres a coulé
la bouche d’un métro
vomit une armée de spectres,
des secrétaires de bureau
minijupes au regard vitreux
un cinéma dans les orbites
on projette des images
dans le cratère désaffecté
d’une planète morte
est-ce à présent
tout ce que permet
l’art poétique
– un désastre
la simplicité

cadavres exquis
vêtues de noir
elles semblent existentialistes
et rient et devisent philosophie
sur le canapé gris
femmes belles d’être libres
jeunes déjà poussières
balayées par les vents
brûlées jusqu’à l’atome
vêtues de noir
portent-elles leur propre deuil ?
horrigamie
couché sur des cartons entre les poubelles
ce qui pousse sur le bois humide
un hikikomori
plie et replie
le destin
– épouser le chiffon froid
l’arracher des serres du croque-morts
et de ta griffe, moïra
lire, relire l’avenir
dans les yeux d’un poisson desséché
comme on décachette une boîte de nuit
comme on décapsule une bière
memento mori
au-delà des poubelles
passent les hommes des sables
et les rennes de phosphore.
gardez le contrôle
