feuillet 1 – anamnèse

Mélusine ? Je la connais d’aussi loin que je me souvienne.

Nous fûmes, j’en suis certain bien que ne m’en restent que les impressions d’un rêve de fièvre, tous deux d’une secte gnostique – c’était à Alexandrie, ou peut-être à Urbicande – qui se réunissait dans le bâtiment désaffecté d’anciens thermes, profitant, sous les voûtes teintées de vert, de la fraîcheur suintante du frigidarium ; comme dans le hall d’une gare d’aujourd’hui, nous y déambulions en de petits groupes ; et j’ai souvenir, comme elle devisait dans un comité autre que le mien, d’avoir croisé son regard, fixé captivé ses prunelles comme elles emmenaient ses iris d’argent jusqu’à l’extrême jonction des paupières, et d’avoir su à l’instant même – d’une foi qui m’est restée à travers les siècles – que brûlait sous cette glace plus qu’en tout être sublunaire, un fragment vif encore de ce feu primordial à nous désormais inaccessible, mais dans la chaleur duquel à la naissance de l’univers et avant que ne soit le temps, nous avons dansé tous deux cœur contre cœur – avant, aussi, que le démiurge ne nous sépare et nous jette dans l’ici-bas terrible.
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Inlandsis

I. Ysengrine

Ysengrine, – Ysengrine, Glorieuse! – tu portais en tes larmes la lumière d’Héliogée.

Fée-louve à la vulve de velours ourlée d’or! Tu mirais ta chevelure dans l’éclat des glaces, quand de son vol vif la frégate t’enlevait parmi les fracas des cascades d’eau et de lumière – Tu mirais ta chevelure dans l’éclat des glaces, rousse pluie d’or bouillonnant sur la neige.

Et la neige des névés se craquait en de bleus séracs, et la neige des névés s’écoulait en turquoise – Ô les eaux grondantes d’Héliogée, en flot de turquoise sous les ailes de l’oiseau ! Continuer la lecture de Inlandsis